LA bibliographie de feu du festival Littérature, conflits, etc.

VENDREDI 16/10

Inger Christensen publie Alfabet en 1981. Ce livre peut être considéré comme le centre et la clé de son œuvre, d’où (re)commencer à découvrir cette écriture d’une complexe simplicité. Par sa construction basée à la fois sur une structure mathématique, la suite de Fibonacci, et la structure la plus connue de la langue, l’alphabet, Inger Christensen définit son lieu d’invention et de représentation, inséparables, de la vie : le poème. Dans Alphabet, sa vision du monde et du langage prend corps dans le vortex qui entraîne irrésistiblement la formation des poèmes. L’existence de toute chose est une apparition à chaque fois qu’un dire singulier en saisit l’universalité.


Alejandra Pizarnik

Ypsilon

17,00

Inédite en français, l’unique pièce de théâtre d’Alejandra Pizarnik, écrite en 1969 et jamais publiée de son vivant, rappelle étrangement, par ses personnages et sa situation, Fin de partie de Beckett. Mais le décor est repeint aux couleurs vives d’une cour de récréation, « adorable et sinistre à la fois ». Pizarnik note dans son journal au sujet de la pièce : « les quatre personnages peuvent être une rêverie de la dactylographe = elle serait les quatre ». À chaque mot, et en chaque personnage, c’est bien elle-même qu’on entend, ses obsessions, ses figures, le désespoir doux d’une voix qui n’a pas renoncé à chercher dans le rêve, le jeu, l’écriture, ce qui pourrait donner sens à son monde. Le théâtre lui est apparu un temps comme une solution pour « transmuer [ses] conflits en œuvres » plutôt que de les « noter directement » dans son journal.


Harlem 1926

Collectif

Ypsilon

En novembre 1926 paraît l’unique numéro de la revue FIRE !! — l’une des plus importantes, certainement la plus radicale, des revues africaines-américaines des Années folles. Elle est conçue par un groupe de jeunes écrivains et artistes, qui joueront un rôle essentiel dans le mouvement de la Renaissance de Harlem, parmi eux des figures emblématiques comme Langston Hughes ou Zora Neale Hurston. Des nouvelles, des poèmes, une pièce de théâtre, un bref essai, un article critique, des dessins… Le recueil est bref et composite, tous travaillent les couleurs et les sons, leur trait et leur discours, à vif, dans un nouveau langage expérimental et intimement expérimenté. La vie du peuple noir est rendue telle qu’on n’avait jamais osé la représenter, les tabous sont levés, on ne regarde pas le monde autour de soi à travers le filtre blanc bourgeois : la prostitution existe, l’homosexualité existe, la musique et la danse, la violence et l’alcool, l’amitié et l’amour, l’art et la littérature, existent — c’est la vie aux États-Unis, vue depuis Harlem la capitale de la culture noire dans les folles années 1920.


8 poèmes & 5 dessins

Ypsilon

15,00

En huit poèmes et cinq dessins, Djuna Barnes fait le portrait des «répulsives» du New York des années 1910. Vaguement identifiées (cadavre à la morgue, danseuse de cabaret, prostituée, silhouette aperçue depuis le métro aérien, maîtresse de maison, mère ?), ses figures sont avant tout des corps soumis au confinement général et à la «vie défaite» de l’ordre victorien. Le Livre des répulsives fait le portrait de ces corps dans l’espace qu’ils s’approprient et qu’ils projettent, par l’exercice assumé de leurs désirs et le contournement des stigmates du féminin.
C’est le premier livre de Djuna Barnes. Il est traduit ici pour la première fois en français.


Natalia Ginzburg

Ypsilon

20,00

Ces onze textes entre autobiographie et essai nous font (re)découvrir l’une des écritures les plus fortes du XXe siècle italien. Qu’il s’agisse du souvenir du confinement dans un petit village du Sud ou du portrait de Cesare Pavese, d’une réflexion sur la valeur de l’argent et surtout d’une bicyclette pour un enfant, ou de son métier d’écrivain, Natalia Ginzburg écrit des « histoires » qu’elle puise dans la mémoire toujours explosive de ce siècle retentissant. Son expérience, qu’elle partage comme un devoir et une nécessité, est exemplaire et bouleversante. Sa voix et son regard sont d’une innocence privée de toute naïveté, d’une intelligence dérangeante car différente quand elle est aux prises avec le plus commun. Dans ces pages (écrites entre 1943 et 1962), nous sommes confrontés à une époque aussi lointaine qu’enfouie en nous qui resurgit simplement grâce à l’air frais et suranné du «lexique familier» de Natalia Ginzburg.